Maëlle, Infirmière anesthésiste

Engagée depuis mi-mars dans la prise en charge des patients COVID+, j’ai dû faire face comme beaucoup à l’urgence.

La charge de travail accrue, le flux de patient important, le manque d’anticipation, de connaissance de ce virus, nous contraignent à être tous sur le pont. Pourtant si ce fonctionnement répondait à une urgence, je sens bien qu’il nous faut redéfinir l’organisation afin de pouvoir récupérer à chaque fois que possible car la culture du repos est loin d’être une préoccupation dans le milieu hospitalier.

Au quotidien c’est la crainte d’être infectée, les nuisances sonores de cette excitation permanente dans les services, les couloirs, les respirateurs… A cela s’ajoute tout l’équipement nécessaire blouse, sur blouse, masque, gants, lunettes ; la chaleur et le stress…pour entrer dans la salle, la « bulle virologique » et en ressortir 5 à 6 heures plus tard sans pouvoir boire, aller aux toilettes car quitter la bulle c’est se déséquiper et « griller » une tenue, vitale pour notre protection et qui nous fait cruellement défaut. Alors je tiens, je continue sauf que pour durer, il faut absolument récupérer.

J’ai donc proposé à mon équipe, lorsque le flux le permet, de fonctionner en binôme et de faire du fractionné c’est-à-dire que tout en étant équipé, mobilisé, je n’ai pas forcément besoin de rester sur le qui-vive. Ainsi mon collègue veille sur les patients pendant que moi je profite d’un temps de pause optimisé, calme, sur ma chaise pour me ressourcer. Et ainsi à tour de rôle chacun peut recharger les batteries et donc être plus alerte sur les heures suivantes même si cela restait assez ponctuelle car plus de la moitié de mes collègues pensent ne pas en avoir besoin…

Les bénéfices ne se font pas attendre car une fois la culpabilité de « se mettre en pause » dépassée, on ressent les effets sur notre humeur, la sensation de mieux gérer la situation, d’avoir pris du temps pour soi et ainsi être plus disponible, efficace pour les autres, de ne pas être constamment en mode urgence.

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